De Brian H.Hook, parue dans le New York Times

Le 24 novembre 2017

Editorial de Brian H. Hook dans le New York Times

Un peu plus tôt ce mois-ci, à l’Assemblée nationale de Séoul, le président Trump a fait remarquer l’histoire tragique des « deux Corées » – l’une libre, juste et pacifique, l’autre tyrannique, oppressive et dangereuse. Ce contraste est à l’origine du défi de sécurité nationale le plus urgent des États-Unis. Il est également présent dans un hôpital sud-coréen, où des médecins travaillent pour sauver la vie d’un soldat nord-coréen blessé et mal nourri qui a fui la semaine dernière l’État esclavagiste de Kim Jong Un.

Le transfuge, dont le nom est encore inconnu du public, a risqué sa vie en traversant la zone démilitarisée à bord d’une Jeep, avant de traverser la frontière hautement surveillée de Panmunjom. Il savait que les troupes nord-coréennes avaient ordre de tirer à mort sur quiconque tenterait de s’enfuir. Au moment où il a réussi à passer de l’autre côté de la frontière, ses bras et son torse étaient criblés de six balles.

Les gardes sud-coréens sont venus à sa rescousse à 55 yards[1] au sud de la frontière, et les médecins n’ont pas tardé à se rendre compte de la gravité de son état de santé : en plus des blessures par balles, il souffrait également de l’hépatite B et d’une pneumonie, et ses intestins grouillaient d’un nombre considérable de vers parasites, atteignant les 11 pouces[2] de long. « Jamais en mes 20 ans de carrière de médecin, je n’avais vu une chose semblable », a déclaré son chirurgien sud-coréen. Les vers peuvent s’enfouir dans de nouvelles blessures, avec des effets potentiellement dévastateurs sur sa capacité de guérir.

La détresse de ce transfuge constitue une fenêtre ouverte sur la vie en Corée du Nord. Pour chaque dépense du régime en armes sophistiquées, chaque monument à la famille Kim et chaque pot-de-vin destiné aux élites de Pyongyang, les souffrances liées à une terrible malnutrition guettent, même les soldats de confiance. Pour la grande majorité restante des Nord-Coréens, la souffrance est encore pire. Telle est la cruauté du régime nord-coréen ­– et telle est la responsabilité de ces gouvernements étrangers qui rendent cela possible.

Chacun des 23 millions d’habitants de la Corée du Nord est soumis à un système brutal de castes imposé par le gouvernement et connu sous le nom de Songbun. Le mot Songbun devrait être connu dans le monde entier. Dès sa naissance, chaque Nord-Coréen est marqué par le gouvernement comme membre d’une caste loyale « noyau », d’une caste moyenne « hésitante » ou d’une caste « hostile », cette désignation déterminant son accès à la nourriture, au logement, à l’éducation, à l’emploi, à absolument tout. Pendant la famine des années 1990, alors que plus de deux millions de Nord-Coréens ont trouvé la mort, le système Songbun détermina souvent qui mangeait et qui mourait de faim.

La Corée du Nord jouissait autrefois d’une industrie lourde relativement productive, en plus de ses ressources naturelles telles que les minéraux. Mais alors que la Corée du Sud a connu un boom après la guerre de Corée pour devenir l’une des grandes économies de ce monde, le Nord communiste a plongé son peuple dans la misère. Des faits de la malnutrition, les enfants nord‑coréens sont nettement plus petits et plus minces que les enfants sud-coréens.

Quelques 30 000 Nord-Coréens ont fui et quitté le pays, tout particulièrement au cours des vingt dernières années, principalement en empruntant une route extrêmement dangereuse à travers la Chine puis vers la Corée du Sud. Le danger vient en partie des gardes-frontières nord‑coréens qui ont pour consigne de tirer à mort. En partie des trafiquants humains vicieux qui cherchent à attirer les transfuges dans le travail forcé ou la prostitution. Et en partie des autorités chinoises qui arrêtent les transfuges et les rapatrient en Corée du Nord, où ils risquent d’être emprisonnés et exécutés. De tels rapatriements violent les obligations juridiques claires de la Chine en vertu de la Convention internationale sur les réfugiés.

La Corée du Nord a également pour cibles ces transfuges qui parviennent à se libérer. Cette semaine, l’administration Trump a désigné la Corée du Nord comme un État commanditaire du terrorisme, en partie à cause de ses assassinats de transfuges et de dissidents nord-coréens à l’étranger, dont le demi-frère de Kim Jong Un, récemment tué en plein aéroport international de Kuala Lumpur. Les États-Unis ne resteront pas les bras croisés alors qu’un régime voyou poursuit sans ménagement ceux qui ont fait le choix de courir vers leur liberté, souvent au prix de leur vie.

Kim Jong Un envoie également des Nord-Coréens à l’étranger, en particulier en Chine, afin qu’ils gagnent de l’argent pour le compte du régime, en travaillant comme esclaves dans les mines, les camps de bûcherons, les chantiers de construction et autres. La Russie a également recours à des travailleurs forcés nord-coréens, dont certains auraient travaillé dans les stades de football de la Coupe du monde 2018. Les responsables des Nations unies ont estimé que ce procédé rapportait à Pyongyang environ 230 millions de dollars par an. L’administration Trump a appelé la Chine, la Russie et tous les autres pays exploitant les travailleurs forcés nord-coréens à y mettre un terme sans plus attendre.

Il est important de détailler les horreurs relatives aux droits de l’homme en Corée du Nord parce qu’elles donnent un aperçu de la menace nucléaire à laquelle nous sommes confrontés et aussi celles des autres pays qui sont toujours disposés à commercer avec le régime de Pyongyang et à le couvrir. Le régime de la Corée du Nord est aussi menaçant pour la paix en Asie que pour son propre peuple. Il est temps pour toutes les nations civilisées – et certainement pour toutes les nations qui cherchent à être mieux respectées sur la scène internationale – de travailler ensemble pour la dénucléarisation nord-coréenne, de manière tardive, soit, mais de manière définitive.

Quant au transfuge de la semaine dernière, il serait sorti cette semaine du bloc opératoire et aurait demandé : « Sommes-nous réellement en Corée du Sud ? » Il a ensuite demandé de pouvoir écouter des chansons sud-coréennes et de regarder des films américains – un petit goût de liberté qui lui a été longtemps nié. Cette semaine permet aux Américains de faire preuve de reconnaissance[3] ; puissions-nous tous apprécier le cadeau précieux de la liberté dont nous jouissons.

Brian H. Hook est directeur de la planification des politiques et conseiller principal en politique au département d’État des États-Unis.

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Nous vous proposons cette traduction à titre gracieux. Seul le texte original en anglais fait foi.

[1] Environ 50 mètres [NDLT]

[2] Environ 28 centimètres [NDLT]

[3] À l’occasion de Thanksgiving.